Questions de sommeil
Épisode 5 : L’art d’être parent d’un enfant avec un trouble du spectre de l’autisme

Intervenants :

Parents d’enfants

Aurélie, maman de Livio, 11 ans
Sophie, maman de Marie, 31 ans
Florence, maman de Julien, 19 ans

Professionnels de santé

Pr Carmen Schröder, Pédopsychiatre, Strasbourg
Pr Stéphanie Bioulac-Rogier, Pédopsychiatre, Grenoble
Dr Michel Lecendreux, Pédopsychiatre, Paris

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Aurélie 

Même pour un enfant typique, il y a quand même toujours quelque chose autour de la culpabilité sur le sommeil. On a l’impression d’être jugé soit en tant que parent, ou même en tant qu’enfant, que l’enfant qui dort bien, c’est un enfant ou un bébé presque parfait et du coup, le parent aussi en tire une certaine gloire ou je ne sais pas. Mais voilà, « il a fait ses nuits en sortant de la maternité » et vous vous êtes là « mais comment ça se fait ? Pourquoi pas moi ? Qu’est-ce que j’ai fait de mal ? ». 

Sophie :

Moi je n’ai jamais eu un sentiment de culpabilité. En revanche, j’ai peut-être eu un sentiment qu’il fallait que je comprenne pour agir. Les problèmes de sommeil de Marie n’ont pas été la première cause d’inquiétude, en fait, du développement de Marie. Je pense même que son diagnostic d’autisme était posé avant que les troubles du sommeil ne s’installent vraiment.  

Carmen Schröder : 

En tant que médecin, ce que j’observe, c’est que si les parents ont déjà beaucoup d’expérience dans la parentalité je dirais, et savent en fait que les difficultés du sommeil de leur enfant ne viennent pas du style éducatif ou parce qu’eux ils font un mauvais travail, entre guillemets, en tant que parents, je pense que là, il y a moins de culpabilité. Mais si je vois les parents où c’est le premier, ou le deuxième enfant rapproché, là, je trouve que c’est quasi systématique ce sentiment de culpabilité, et pour lequel je vais aussi questionner en consultation, parce que c’est souvent un très très grand soulagement pour les parents d’en parler.  

Florence : 

Moi, mon fils est grand, il a 19 ans, il va avoir 20 ans. Pour faire très rapide, il a eu de gros troubles de sommeil jusqu’à presque 13 ans. Quasi chaque nuit avec tout le spectre des troubles de sommeil, troubles d’endormissement, réveils nocturnes fréquents, levé très tôt, etc. Et ça s’est un peu tassé à l’adolescence avec des épisodes aigus mais espacés.  
La prise de conscience des troubles de sommeil majeurs de Julien, ça a été très long finalement, très long jusqu’à ce qu’un pédopsychiatre puisse nommer ses troubles sévères de sommeil, il avait seulement 6 ans. La culpabilité, je ne l’ai pas eue en fait jusqu’à ses 6 ans. Ensuite, c’était plus une culpabilité par rapport aux conséquences des troubles de sommeil, le fait d’être épuisé en journée et la culpabilité de ne pas, peut-être, bien faire finalement. Mais en fait, on a très tôt cherché à comprendre déjà, comprendre pourquoi, et ça on a été bien accompagné par des médecins notamment. Et c’est ça qui nous ôte la culpabilité finalement, de comprendre que ce n’est pas juste parce qu’on ne sait pas aménager ou qu’on ne peut rien y faire, qu’on peut atténuer peut-être mais pas résoudre finalement.  

Michel Lecendreux : 

Ce qu’on entend surtout c’est le délai d’apparition des symptômes et le délai diagnostique et voir comment les deux choses se recouvrent. Parce que, comme disait très bien Carmen, il y a le problème de la parentalité (comment vous éduquez l’enfant au sommeil) et puis à quel moment, dans le développement, ces troubles du sommeil deviennent un mode d’alerte qu’il se passe autre chose, que l’enfant a peut-être un trouble du neurodéveloppement, il a peut-être quelque chose qu’on n’a pas encore diagnostiqué. Et une fois qu’on approche le diagnostic, une fois qu’il y a des mots dessus, que finalement vous allez pouvoir être accompagné par un médecin ou par une équipe médicale ou paramédicale, les choses vont un peu mieux et rentrent un peu dans l’ordre.  

Carmen Schröder : 

Oui, tout à fait. Et je pense que de mettre le nom dessus, vous le dites bien Florence, c’est ça qui vous a finalement aidé et aujourd’hui, ce qu’on n’avait pas à l’époque, il y a des explications physiopathologiques, donc on peut expliquer d’où ça vient, en tout cas en partie, et après proposer des solutions.

Florence : 

Et puis les parents ont cette capacité à s’adapter aussi. Je pense que dans l’autisme, en fait, on adapte tout, à la fois la partie rituels (on ritualise énormément), surtout quand le handicap est sévère. Et en fait, c’est pour ça que je parle de prise de conscience, parce qu’on s’adapte depuis tout petit à ce qu’il s’endorme très tard, à ce qu’on se lève plusieurs fois la nuit, à 6 heures du matin on soit debout. Et voilà.  

Michel Lecendreux : 

Dans le témoignage de Sophie, si j’ai bien compris, le diagnostic d’autisme a précédé celui de troubles du sommeil, en quelque sorte. Donc c’est peut-être aussi là que la notion de culpabilité est différente. 

Sophie : 

C’est à dire que ma fille a été diagnostiquée à l’âge de 2 ans et demi. La partie sommeil s’est installée un petit peu plus tard ; elle devait avoir au moins 3 ou 4 ans, quand elle a commencé à ne pas bien s’endormir.

Carmen Schröder : 

Il y a effectivement ces différents modes d’entrée. Il y a des enfants où les troubles du sommeil sont ultra précoces. Au début tout se focalise finalement sur le sommeil et on va suspecter progressivement qu’il y a aussi un trouble du neurodéveloppement caché un peu derrière ces symptômes très importants de troubles du sommeil, parfois d’autres troubles associés comme les troubles alimentaires, et il y a des débuts de symptomatologie un peu plus décalés, a priori comme c’était le cas chez vous, Sophie. 
Donc, ce sont différents modes, et je pense que la culpabilité peut être différente en fonction du mode d’entrée. Comment c’était chez vous, Aurélie, par rapport au début des symptômes ? 

Aurélie : 

Dans la séquence « quel diagnostic il a eu en premier ? » je pense que c’est plutôt les troubles du sommeil, même si ce n’était pas quelque chose qui était vraiment nommé. Et par rapport à ce que j’entendais des autres témoignages, je dirais que ça a mis du temps à être nommé. C’est-à-dire que c’est effectivement quand on a eu le diagnostic d’autisme où là effectivement on nous a expliqué que les troubles du sommeil étaient potentiellement liés à un déficit en mélatonine qu’on observait chez les personnes avec TSA.

Mais avant cette étape-là, on a eu du mal, c’est-à-dire que j’ai essayé de chercher des solutions, je pense qu’il a été en consultation du sommeil mais qui n’était pas spécialisée TSA. Et là, vous faites les agendas du sommeil, on parle, voilà, on essaye de vous expliquer un peu tout ce qu’on peut essayer de ritualiser, etc. Mais ça ne marche pas bien, en fait. Et puis, voilà, vous sentez aussi que vos interlocuteurs sont un peu moins à l’aise parce que c’est des TSA qu’ils disent on connait moins bien. Et là, je trouve que, alors qu’on est en train de chercher des solutions, et en dépit de la bonne volonté de tout le monde, on se sent… en fait très démunies parce que vous sentez bien que même l’équipe médicale qui essaye de vous aider d’apporter des solutions, vous dit « on ne sait effectivement pas trop, voilà, essayez ça …mais pas que… » et ça ne marche pas. Et du coup, je trouve que ça renforce encore un peu voilà ce sentiment un peu d’impuissance voilà de solitude et d’incompréhension qui était assez difficile et qui effectivement, était un petit peu moins fort à partir du moment où voilà vous comprenez un petit peu mieux ce qui se passe.

Stéphanie Bioulac : 

Ce qui me semble important là dans ce que vous dites, Aurélie, c’est aussi cette notion d’impuissance. Vous aviez l’impression que ni vous, ni l’équipe médicale, paramédicale, pouvez proposer, adapter… On imagine bien que ça a un véritable impact aussi sur l’anxiété, la tristesse, et c’est ce qu’on avait pu voir aussi en termes du retentissement sur la qualité de vie de la famille, des troubles du sommeil. 

Aurélie : 

Le problème c’est que si vous allez voir des spécialistes qui sont des spécialistes mais pas des TSA, vous sentez que les autres spécialistes sont un petit peu perdu quand même sur ce patient qui est un petit peu différent, que vous avez du mal à examiner, qui ne va pas forcément exprimer son ressenti, ses douleurs etc. Et du coup, vous essayez plein de petites choses et en fait il n’y a pas de réponse, et on sent tout le monde un petit peu perdu et alors même que je trouve qu’en tant qu’entourage, en tant que parent il faut aussi cette énergie d’aller chercher des solutions, des endroits, des spécialistes à qui parler, cette énergie qui est encore plus difficile à avoir quand vous ne dormez pas. 

Carmen Schröder : 

Oui, tout à fait. Et je pense que c’est là que les TSA questionnent presque un peu : comment doit être médecin aujourd’hui ? C’est vrai que dans les TSA, idéalement ce qui se passe, c’est que vous avez un expert, par exemple, du trouble digestif, mais qui est entre les parents. Et en fait, les parents sont vraiment experts de leur enfant. Parce que même si on est expert TSA ça ne va jamais s’appliquer à tous les enfants avec TSA, chaque enfant est très différent, a un symptôme, a un fonctionnement très différent. 

Et c’est vraiment pour que le médecin, je dirais, soit suffisamment humble pour se mettre avec son expertise à la disposition des parents, pour chercher ensemble finalement quelle stratégie est adaptée, qu’est ce qui peut fonctionner, qu’est-ce qu’on peut tenter et ça c’est forcément un peu hors les règles, les prescriptions habituelles. 
Donc je donne cette question, autour du co-sleeping, c’est-à-dire le fait de partager le lit avec son enfant. Évidemment, dans la médecine du sommeil, globalement, ça va plutôt être déconseillé parce que ça ne va pas être une solution durable pour un bon sommeil indépendant de l’enfant. Mais il y a parfois quand même des situations où les troubles du sommeil sont sévérissimes, les parents sont totalement épuisés, l’enfant a des gros troubles sensoriels. Par exemple, des hyposensibilités proprioceptives, où il a besoin d’appui fort, où on n’arrivera pas tout de suite, en fait, à trouver une solution du jour au lendemain, où parfois c’est effectivement un projet qui peut se mettre en place sur de nombreux mois où finalement on va dire d’abord « OK, on va déjà faire une pause, il y a peut-être une période de co-sleeping acceptable, on va réfléchir comment progressivement on peut remplacer ça. Et on va mettre ça en place, mais déjà après une phase de récupération, où finalement peut-être pendant un mois le parent dort avec l’enfant, tout le monde récupère un peu, ce n’est pas idéal, on sait que ça ne va pas rester comme ça, mais après on va progresser vers autre chose. Et je pense autour des situations comme ça, ça peut parfois cristalliser la culpabilité, avec un médecin qui reste dans la position généralement acceptée :  Non, pas de co-sleeping, ce n’est pas bien. Et les parents qui disent « oui, mais comment on va faire en fait ? Personne ne va dormir. ».

C’est ça qui est souvent difficile, à mon avis, c’est un peu ce qui heurte les parents ; c’est que leur expertise est parfois mise de côté, le médecin vient avec son savoir universel mais qui ne s’applique pas du coup à leur enfant, ce qui n’est pas faisable. Et je pense que c’est de ça un peu qu’il faut un peu qu’on sorte dans nos approches thérapeutiques. 

Stéphanie Bioulac : 

Moi, avec les familles, j’essaie de dire qu’il y a des objectifs à court terme, moyen terme. On va essayer d’évoluer ensemble. 
Parce que moi j’aime bien quand même la notion de parents experts, c’est vous qui connaissez le mieux votre enfant. Et c’est dans ce sens-là où vraiment, il faut qu’on construise ensemble les stratégies thérapeutiques. Parce que, c’est vrai que quand même dans le sommeil chez l’enfant à développement typique, enfin je pense que je suis un peu sévère et un peu stricte chez les enfants à développement typique ; mais chez les enfants qui ont un trouble du neurodéveloppement, il faut qu’on fasse différemment avec cette histoire-là, cette connaissance-là, mais on est obligé de s’adapter. 

C’est aussi pour ça que je crois que c’est important, ces vignettes cliniques que vous nous apportez, parce qu’on voit bien que vous nous apportez plein de solutions. On s’appuie sur une connaissance mais c’est l’expérience de chaque famille en fait, qui nous aussi nous rend plus experts. C’est parce qu’on a rencontré beaucoup de familles et on peut proposer aussi plus de stratégies à la prochaine famille.  

Carmen Schröder : 

Peut-être une autre métaphore à choisir, ça reprend ce que tu dis Stéphanie, des objectifs à court, moyen, long terme ; c’est la métaphore de l’escalier. On est en bas de l’escalier et en haut de l’escalier, c’est là où on veut arriver. Et il y a plein de marches intermédiaires pour y arriver et finalement de chercher avec la famille quelles pourraient être ces marches déjà. Et aussi, quand est-ce que vous êtes prêtes à entamer la prochaine ? 

Donc parfois on se dit « Bon là on est arrivé là, c’est déjà très bien. Maintenant la prochaine étape, ça serait alors ça. Est-ce que c’est un bon moment ? Non, on va attendre les prochaines vacances, par exemple, parce que là vous n’aurez pas le travail à affronter la journée, et c’est à ce moment-là qu’on fait la prochaine étape ». Et donc plutôt rester sur vraiment des acquis progressifs. Tout ça ce sont des outils ; Comment arriver au but ? Vraiment, c’est à chercher avec les parents et à définir ensemble et à adapter vraiment à chaque fois. 

Florence : 

Je pense que de plus être seule, d’être entouré c’est quand même ça l’essentiel. De pouvoir en parler, de pouvoir avoir un suivi, de savoir que peut-être le mois prochain ou dans deux mois on va pouvoir discuter… C’est ça aussi que nous apportent les médecins, les spécialistes, les professionnels qui nous entourent, c’est qu’on n’est plus seul avec quelque chose qui est juste invivable. Ne pas dormir, je pense que vous en avez parlé, c’est juste une torture permanente ; quand il a 5 ou 6 ans on ne s’en rend pas compte encore, mais oui ça dure des années.  

Sophie : 

Ce qui est important dans l’accompagnement, c’est de nous aider à prendre un petit peu de hauteur ou de recul, nous apprendre à observer. Parce que quand on est le nez dans le guidon, on n’y voit plus clair et on a l’impression, notamment dans cette histoire d’escalier, et qu’on ne va pas mesurer forcément qu’il y a du progrès (ou pas d’ailleurs dans l’autre sens). Et c’est vrai, par exemple tout simplement de noter, on ne met pas en place des actions extraordinaires, mais on va juste noter le temps qu’on a passé par exemple pour l’endormissement, à quelle heure s’est endormi, le nombre de fois… Et ce qui permet sur le moyen terme déjà de se dire « regardez depuis 3 mois en fait, certes, ce n’est pas parfait, mais finalement, le temps d’endormissement, il est passé de trois heures à deux heures ». Alors, ce n’est peut-être pas beaucoup, mais ça montre une démarche de progrès. En fait, il faut que les parents puissent voir les progrès qu’ils font.

Aurélie : 

Quand on parlait des conseils à donner, je dirais aussi c’est peut-être des conseils à donner aux parents de comment prendre soin d’eux aussi, parce que moi je suis persuadée que quand on n’est pas bien et qu’on ne prend pas soin de soi, on va avoir du mal à prendre soin des autres.   Moi j’aurais adoré aussi avoir quelques petits trucs aussi, sur comment est-ce qu’on fait pour récupérer pendant la journée, pour se rendormir assez vite… Enfin, il y a une espèce de tension dès que le soir arrive, en se disant « la nuit va être horrible ». Et voilà, je pense qu’il y a aussi effectivement le trouble du sommeil de l’enfant à prendre en charge, mais c’est aussi son entourage et comment il peut mieux le gérer possible. Et ça fait aussi partie un peu de cette déculpabilisation de dire « vous avez le droit de prendre soin de vous pour mieux prendre soin de l’autre ».  

Michel Lecendreux :

Il y a une chose qui n’a pas été abordée par les parents, c’est la culpabilité éventuelle à donner un médicament. Et à donner un médicament sur le court terme ou sur le long terme, parce que l’escalier est parfois très haut et très long. Je voulais savoir comment, en tant que parent, vous viviez ce paradoxe que peut-être l’enfant va mieux dormir, mais parce qu’il prend un médicament. 

Florence : 

C’est une très bonne question effectivement. Je connais des parents qui n’ont jamais, malgré des troubles de sommeil très importants, donné quelque chose à leur enfant, refusé totalement et maintenant, la jeune fille à qui je pense à 20 ans. Donc oui c’est une culpabilité. On a des tas de questions sur l’impact à moyen terme, à long terme. Donc là aussi, le rôle pédagogique du médecin, du prescripteur est essentiel et on va revenir, ce n’est pas en une fois, peut-être qu’il va falloir re-questionner.

Aurélie : 

Ensuite là, il peut y avoir une culpabilité, c’est quand l’arrêter en fait aussi ; c’est-à-dire que quand il commence à mieux dormir, il y a quand même aussi une petite appréhension de dire « est-ce qu’on l’arrête, on n’arrête pas ? », et de se dire finalement « est-ce qu’on continue pas à le donner  ? parce que nous on est aussi dans un certain confort et ça nous va bien ».

Carmen Schröder : 

Alors on pourrait dire tellement de choses là-dessus, mais c’est très important, évidemment, d’avoir un médecin qui a l’habitude de prescrire, qui peut vous alerter sur ce qu’on peut attendre… Parce si les attentes sont irréalistes… ? Comment est l’indication ? Pourquoi ce médicament pour ce trouble-là ? Quels sont les effets secondaires, etc. ? Mais aussi dire, et en plus, chaque enfant réagit individuellement à chaque molécule ; alors à quoi est-ce qu’on peut s’attendre d’une manière réaliste ? Parce que sinon, parfois, les parents prennent beaucoup de temps pour se décider pour un traitement, après, il faut que le traitement résolve tout et ça, c’est évidemment pas du tout réaliste.

Alors à quels symptômes est-ce qu’on va faire attention et qu’on va réévaluer ensemble ? Si on prévoit ça dès le départ, la déception va être moins grande et plus il y a une alliance. Et comme vous avez dit, je crois Florence tout à l’heure, de se sentir en équipe un peu, c’est-à-dire on est accompagné, c’est la même équipe autour de l’enfant, on va chercher ensemble. Donc là aussi, je pense qu’il faut que le médecin rencontre l’expert qui est le parent et autour de ça, il faut chercher ensemble la bonne molécule, la bonne posologie, la bonne durée de traitement. 

Florence : 

Je dirais de ne pas rester seul, déjà. De ne pas rester tout seul avec sa fatigue, sa souffrance terrible, ses questions, sa culpabilité justement. Et la deuxième chose, de lui dire qu’il a besoin de temps pour lui ou elle, voilà. Mais surtout je lui dirais que je n’ai pas de solution, que je ne juge pas, que c’est normal qu’il soit fatigué ou qu’elle soit fatiguée. C’est bien normal. C’est invivable quoi. 

Sophie : 

Sans donner de conseils, je dirais que quand même aujourd’hui, on peut essayer de trouver des solutions et des réponses. Et peut-être de l’aider à trouver quand même les bons interlocuteurs. Il y a beaucoup de charlatanisme aussi autour de ces questions-là. Donc peut-être, sans juger, mais essayer d’accompagner, étant donné qu’on est des parents qui avons vécu la chose et qui aujourd’hui… Finalement, on a toutes les trois trouvé quelques solutions et je ne dis pas que ce n’est pas nos solutions qu’il faut donner, mais les accompagner à trouver leurs solutions. Je pense que les associations de familles ont un rôle important aussi à ce niveau-là, de parler entre pairs, entre parents qui ont vécu la même chose.  

Aurélie : 

Moi je dirais d’abord que je les comprends, que c’est difficile et que je comprends les difficultés et je les partage encore de temps en temps. Mais voilà, surtout effectivement de ne pas hésiter à en parler. Puis on se rend compte que de toute façon, même par rapport à ces discussions, on est dans un autre monde, mais on est quand même quelques-uns à être dans cet autre monde-là et qu’il ne faut pas hésiter à en parler, maintenant on sait qu’effectivement, il y a des gens comme vous qui connaissent cette situation-là et qui peuvent aider, que des solutions existent et, effectivement, aussi de prendre soin de soi parce que c’est extrêmement difficile. C’est pas facile de sortir de tout ça, mais déjà si on dort mieux, on est un peu plus armé pour réussir à sortir un petit peu de ce schéma-là et à rentrer, je dirais aussi, dans l’action, dans la prise en charge… et donc quelque chose d’un peu plus positif et qui rend la vie plus facile en tout cas au jour le jour.  

Michel Lecendreux : 

Je crois qu’à vous entendre on ne peut être que d’accord : c’est ne pas rester seul.

Je reprendrais ce qu’a dit Aurélie sur le fait de récupérer, récupérer le sommeil du parent, il faut le faire. On sait que les parents exposés à des troubles du sommeil sur des longs termes, ils deviennent eux-mêmes des insomniaques. Donc, il faut les aider à le gérer. Je crois que c’est autour de la notion de se rendre disponible, qu’il y a de la culpabilité. « Est-ce que je suis un parent qui devrait plus intervenir la nuit, moins le jour ? », il faut trouver l’équilibre, il faut se faire accompagner, il faut éviter que le couple se délite aussi. Je pense que c’est important que le couple soit pris en charge dans la gestion de ces problèmes. Et puis dans les associations il y a quand même très souvent de très bonnes choses sur l’accompagnement… Et je pense qu’on peut rester seul mais on ne doit pas rester seul, il y a beaucoup de moyens de ne pas rester seul. 

Stéphanie Bioulac : 

On va faire équipe les parents, donc le couple, la famille, l’enfant et le médecin, l’équipe paramédicale. On va construire ensemble les stratégies thérapeutiques et c’est tous ensemble qu’on va diminuer les troubles du sommeil.  

Épisode 1 
Mon enfant dort mal : est-ce « normal » ?